Mots de Mai

Sa palette dépoussiérée, la nature étale ses gouaches de la pelouse jusqu’aux nuages. Les lainages se blottissent au fond des placards, les âtres se sont obscurcis. Dehors, tout éclot, tout grandit, tout renaît, tout fredonne… Et partout coule la sève du printemps, qui lentement se déconfine…

Dans son lit se sont déposés quelques mots, par les jours de mai, et ses nuits poétiques…

Agréable lecture printanière à tous,
A bientôt dans les interlignes,

Carole.

 

Quelques battements d’aile au-dessus des iris
Remuant tous les vents, composant leur musique
Dans des reflets de ciel aux parfums oniriques
Renouvellent la vie ignorant ses caprices

De la lumière à l’ombre, par les calmes violents
S’écoule jusqu’au cœur la sève du printemps

 

 

 

Sans or et sans plus d’atours
Le visage contre tes velours
Les doigts à tes crins mêlés
Je ne rêve que de danser

A cette hauteur qui n’existe pas
Mon cœur offert à chaque pas
Le souffle court, les yeux fermés
Je ne rêve que de voler

 

 

 

Des lendemains opaques et quelques songes flous
Et des lambeaux de voile autour d’un mat qui craque
Sur de nobles gréements défigurés en barques
Leurs voyages perdus en figure de proue

Ne reste d’une paix à jamais confinée
Que l’envol d’une bulle aux confins du passé

 

 

 

J’ai mis pour les garder
Nos précieux partagés
Dans un coffre à l’abri
Près des trésors meurtris

J’y ai placé aussi
Tes rires sous ma pluie
Ce dont je rêve cent fois
De ma peau sous tes doigts

J’y enferme mes pleurs
Les secrets de mon cœur
Ceux que tu sais déjà
A chaque alinéa

 

Un café, un arôme, une caresse
Un soupir sur les lignes d’un cou
Des heures enveloppées de paresse
Des regards qui savent déjà tout

Un café, une chaleur douce-amère
Les fragrances d’un peu de paix
Des lèvres effleurées qui chuchote dans l’air
Le vœu que demain n’arrive jamais

 

Alors l’écho s’est tu
Mes mots ne résonnent plus
Je noircis tant de pages
Mais l’encre y est volage

Elle est portée sans note
L’absence dont se dotent
Mes feuilles et mes cahiers
Aux reliures décollées

De bouts tout écornés
En passages soulignés
Il s’est usé mon livre
Il t’attend pour revivre

 

Mes vers ont perdu leur écho
Sur des feuilles vierges de tes mots
Au soir mes poèmes s’embrument
Ma prose est veuve de ta plume

Depuis que ton encre est tarie
Tes adieux écrivent mes nuits
Noire de rêves sans emphase
Ma page est veuve de tes phrases

 

 

Le reflet de demain se noie d’incertitude
En ce trouble torrent où rien n’est à sa place
Ne reste plus qu’à croire que cet interlude
Soit le lit d’un éveil pour un peu plus de grâce

Car même si nos chaines et nos craintes renâclent
Il faudra tous nous battre pour notre miracle

 

 

Que ferions-nous
Si nos étoiles se filaient
Si nos regards s’appartenaient

Que ferions-nous
Si nos chamades restaient les mêmes
Si nos nuits étaient moins blêmes

Que ferions-nous
Si comme nos mots et leur ballet
Nos étreintes se répondaient

Que ferions-nous
Si ça arrivait

 

Demain encore, je sourirai
Comme si je croyais au bonheur
Vous ne saurez sans doute jamais
Les hématomes vêtant mon cœur

Demain encore, je sourirai
Je ferai semblant d’avancer
Vous ne saurez sans doute jamais
L’errance de mon âme déchirée

 

Un regard au hasard
Sur des phrases nues
Deux encres qui s’égarent
Au glissé confondu

Elle croyait tout connaître
Des ratures, des aspérités
Elle croyait même être
Bien sur terre enfin posée

Sans pouvoir s’en défendre
Son destin s’est perdu
Entre deux méandres
Il est son inconnu

 

 

Il y aura une vie
Pour d’autres voyages
Et moins de bagages
Encombrés d’ennui

Une vie ailleurs
Sans plus aucune chaîne
Laissant à la traîne
Les sillages de peur

Une vie plus loin
Près de ce qui vibre
Où mes phalanges libres
Retrouveraient ta main

Il y aura une vie
Où les nuages ne pleurent
Qu’entre deux candeurs
Sous un ciel fleuri

Une vie différente
Sans plus de cadenas
Où ton souffle gardera
Mes ailes vivantes

Une autre vie
Pour les fous comme nous
Qui danseraient sous
Des soleils de pluie

 

En cette aube fragile juchée sur l’hiver
Des pâleurs floconneuses apprêtant les préludes
Contre ta paix mon cœur n’a qu’une certitude
Ce matin les ténèbres vont perdre la guerre

En cette aube augurant tant d’autres nouveaux jours
Le reste de ma vie oubliera les rebours

 

 

Un bruissement d’aile
Dans les voltiges du ciel
Libre au vent perdu
Au souffle retenu

Des plumes posées sur l’air
Éclaboussées d’éther
Depuis tous les levants
Au plané d’un instant

Une parcelle d’infini
Quand le soir descend
Sur le temps de la nuit
Depuis la nuit des temps

 

Telle une frêle brise
Sur une nuque de soie
Un soupir éternise
L’envie et les émois

Une valse sans temps
Suspension d’un mélange
Un frisson qui répand
Le murmure des phalanges

Des lèvres s’impatientent
Et du velours réclame
L’oubli de la tourmente
La glace dans les flammes

 

Et tes crêtes sillonnent le bas de mes pentes
Mes ténèbres reposent au seuil de tes matins
Et mes sommets rallient le fond de tes ravins
Tes nuits se perdent quand mes étoiles les hantent

Nos routes parsemées de cahots se ressemblent
Par-delà les virages leur horizon s’assemble

 

 

Je ne sais pas toujours
Les semblants, les limites
Je ne sais jamais
Les adieux, les prisons
Mais je sais ton rire
Et ses délivrances

Je ne sais pas du tout
Les impossibles, les jamais
Je ne sais pas plus
La rancœur, les rengaines
Mais je sais ta voix
Et tout ce qu’elle panse

 

Je sais qu’en ce lieu que je ne connais pas
Poussent des violettes le long des murs de pierre
L’automne se vêtit d’un châle de bruyère
Un coussin s’abandonne où ronronne le chat

La musique compose l’éveil dans tes bras
En ce lieu de lumière qui m’attend déjà

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